Dans la caravane de Johnny Hallyday, un correspondant local raconte …
La Voix du Nord publie le témoignage émouvant de Patrick Laplace, qui s’est retrouvé malgré lui pour son plus grand bonheur dans la caravane de Johnny Hallyday à l’issue de son concert. Récit.
Le 19 novembre 1990, Johnny Hallyday donne un concert mémorable à Boulogne sous un chapiteau installé place Léon-Blum. Patrick Laplace, instituteur de métier, correspondant local de presse à ses heures, a tout oublié ou presque du concert. Pour lui, l’histoire a commencé après, quand il s’est retrouvé dans la caravane du chanteur, sur son lit, même, pour une heure d’interview. Surréaliste.
Pour vous situer le personnage, Patrick Laplace, c’est un peu l’anti-paparazzi. Instituteur de métier, passionné de sport (le volley puis, beaucoup plus tard, la pétanque à un niveau… international), il fut aussi pendant plusieurs années correspondant local de presse pour notre agence boulonnaise. On ne lui connaît aucun goût pour les mondanités et si d’aventure il s’est fait appeler « Président » c’était juste en sa qualité de patron d’un club boulonnais de volley-ball, le célèbre CGSM. Bref, rien, sauf un incroyable concours de circonstances, ne le prédestinait à passer une heure en tête à tête avec notre Johnny national. C’est pourtant bien ce qui lui est arrivé le 19 novembre 1990 ; et depuis, son entourage a entendu l’histoire environ 768 fois mais ne s’en lasse toujours pas.
Sur le lit de Johnny
En 1990 donc, c’est le club de football de Boulogne, alors appelé USGB, qui décide de faire venir l’idole des jeunes. Non que les footballeurs boulonnais se découvrent une soudaine passion pour Johnny Hallyday, mais il s’agit surtout de renflouer les caisses du club, très mal en point. Le concert est un gros carton : 4000 personnes sous chapiteau, il paraît que l’on a entendu « Que je t’aime » jusque dans les quartiers sud de La Capelle… Patrick Laplace, lui, n’est pas de ceux qui chantent « Gabrielle » sous la douche. Sa présence sur place se justifie par une petite rubrique régulière qu’en tant que correspondant pour la page de sport il ressort chaque fois qu’une célébrité met un pied à Boulogne. « J’allais voir les artistes qui passaient à Boulogne et je leur demandais quel était leur sport favori. » Francis Lalanne, notamment, avait gentiment répondu à l’invitation de Patrick quelques temps auparavant. Avec Johnny Hallyday, forcément, notre correspondant se doutait bien que l’affaire serait un poil plus corsée. « J’ai rencontré l’impresario du chanteur l’après-midi même, sous le chapiteau. Il m’a répondu clairement que quand Johnny donnait une interview, ce n’était jamais avant le concert, toujours après. Mais évidemment, il ne m’a donné aucune garantie sur l’issue de l’affaire. Il fallait juste attendre et essayer. » Voilà notre ami parti pour deux heures de spectacle dont beaucoup de Boulonnais se souviennent. Pas lui. Enfin, juste des bribes, comme ça. « J’attendais plutôt la fin ! »
Un accident à Boulogne dans les années 60
Après le concert, alors que le chapiteau se vide, Patrick Laplace rejoint un groupe d’une quinzaine de personnes qui font déjà le pied de grue devant la caravane du chanteur. « Il y avait là beaucoup de journalistes de la presse régionale et de la presse parisienne. » L’impresario passe la tête et prévient : « Johnny est fatigué, il ne recevra qu’un seul d’entre vous ». Et son regard se pose sur Patrick, rencontré entre deux portes l’après-midi même sous le chapiteau. « Il pointe le doigt vers moi et il dit vous. » À ce moment-là de l’histoire, notre correspondant sportif comprend qu’il s’apprête à vivre un grand moment de sa vie, n’ayons pas peur des mots ! « Je suis entré dans cette toute petite caravane, Johnny était allongé sur le lit, transpirant, la serviette autour du cou. Je ne savais pas trop où m’installer, c’était vraiment exigu, alors je me suis assis discrètement sur le petit radiateur… » Avec Johnny, pas de chichis… Il lui lance, en tapotant la main sur le lit pour joindre le geste à la parole : « Viens t’asseoir à côté de moi! » Déjà un peu dans ses petits souliers (… face à une telle pointure !) notre instituteur-correspondant de presse se retrouve donc, en tout bien tout honneur, sur le lit de Johnny !
« La première question est sortie tout de suite, comme un réflexe, je lui ai demandé comment il faisait pour avoir une forme pareille ! Il a répondu sous forme de boutade, qu’il prenait des produits illicites. Et il a éclaté de rire. Et après ça, il fallait trouver une deuxième question et ça n’a pas été simple… Je n’avais rien préparé hormis des questions sportives. » Il fut donc question du public boulonnais, qui avait eu du mal à « démarrer » mais aussi d’un mauvais souvenir que Johnny conservait de Boulogne. « Il se souvenait avoir eu un accident sur la route de Boulogne au volant de sa Porsche TR3 en venant à un concert, au début des années soixante. » Le chanteur s’était retrouvé au fossé, avait été éjecté de la voiture et avait perdu connaissance. De voiture, il fut encore question dans la conversation ensuite, de façon un peu plus légère quand Johnny évoqua sa passion du sport automobile.
Souvenirs, souvenirs
Après une heure de tête à tête et une interview « chaleureuse, vraiment sympa et détendue», Patrick Laplace a salué Johnny et refermé la porte de la caravane devant une bande d’amis totalement médusés, qui l’attendaient à la sortie. « J’ai repris ma voiture, je suis remonté chez moi, j’habitais au Chemin-Vert à l’époque, mais j’ai dû m’arrêter dans la rue du Camp de droite pour souffler ; je me demandais si ce que je venais de vivre faisait partie du réel. » Le lendemain matin, direction Fruges, où ses élèves l’attendaient. « Après le boulot, il a fallu mettre tout ça sur papier. Évidemment, il n’était plus question de ma petite rubrique, on a fait trois pages ! » Vingt-trois ans après, quand Patrick Laplace raconte cette histoire à ceux qui ne la connaissent pas (pas encore…) beaucoup de gens ont du mal à le croire. Avec un regard en coin du genre « oui, c’est ça, et moi, ma mère c’est la reine d’Angleterre... » Peut-être. En attendant, « Souvenirs, souvenirs », on écouterait bien l’histoire une 769e fois…
Source : La Voix du Nord